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“J’ai peur du définitif”

Les articles, interviews, étaient trop nombreux pour qu’on vous les traduise tous : Rousseau préconisait qu’on n’apprenne que ce qu’on a grande envie d’apprendre, donc ça a été une bonne occasion de lire de l’anglais j’imagine. Mais il y a eu aussi des articles intéressants dans d’autres langues, Thom et Nigel ayant donné des interviews en Italie, aux Pays-Bas ou en Allemagne tout aussi bien qu’en Australie (interview intéressante dans le prochain numéro d’Oyster).
 
Dans le numéro de mars de « Visions », un journal allemand, ils livrent des détails inédits : interrogé pour savoir quel type de leader a été Thom en studio, Nigel Godrich répond que Thom n’est pas un chef né, plutôt un marionnettiste, un « manipulateur avec de bonnes manières ». Qu’il intervenait pour approuver ou non, qu’il était bien en dernier ressort celui qui pensait et qui conduisait tout le monde mais en laissant chacun développer ses intuitions et à la fin, quand Thom approuvait quelque chose, les autres avaient l’impression de l’avoir fait juste pour lui faire plaisir.
Thom révèle qu’il aimerait bien pouvoir écrire des textes comme Dylan, qu’une chanson comme Sad Eye Lady of Lowlands lui a fait passer pas mal de nuits sans sommeil, mais qu’il ne sait pas dérouler une histoire, que ses textes restent abstraits parce qu’il veut absolument éviter de fixer le sens en rapport avec lui. De même, il refuse que les arrière-plans politiques ou sociaux de ses textes deviennent des slogans ou soient univoques: “J’ai peur de ce qui est définitif.” Nigel Godrich parle plutôt d’abstraction et intervient dans l’interview pour modérer l’autodépréciation systématique de son ami.
 
Ils se livrent à l’exercice de commenter à chaud l’écoute des 9 titres d’AMOK. C’est la partie que je vous traduis complètement :
 

  1. Before your very eyes

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Yorke : Je pense à New Adventures in Hi-Fi, mon album préféré de R.E.M. Pour moi, c’est exactement la même ambiance cachée.

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Godrich : Je pense au milieu du morceau, quand il s’ouvre et que les accords se déplacent. Cela a été un moment magique en studio.

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  1. Default

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G. : Je me souviens que Thom disait : « on devrait essayer une fois de jouer cette partie à l’envers. » Et c’était vrai ! C’était exactement ce qui manquait dans cette chanson qui est une sorte de puzzle.

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T. : Je me souviens du moment où on a essayé de faire cette chanson. C’était à New York, j’étais avec ma femme et mes enfants. Le matin, je devais surveiller les enfants mais ils se réveillaient à 6h30 à cause du décalage horaire. Je ne dormais que 3 heures par nuit et je leur mettais dans les mains des albums à colorier, j’étais incapable de faire mieux !

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  1. Ingenue

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Y. : On a développé ce morceau à 3, Nigel, Joey et moi. Et ça a été un grand moment de plaisir. Dans la version primitive, je jouais surtout des claviers. C’est un beau morceau.

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G. : J’aime bien quand Thom s’assoit au piano. Honnêtement, bien plus que quand il joue de la guitare.

[/quote] 4.  Dropped
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G. : Cette chanson a traîné pendant des années, sans fin. Ce n’était qu’une esquisse. On a trouvé ça amusant de la voir enfin finie.

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Y. : Pendant longtemps on a eu que le rythme. Un rythme errant…Et des comme ça, il y en a encore beaucoup, beaucoup sur mon petit carnet.

[/quote]  5. Unless[quote ]

G. : Celle-là me donne la chair de poule. Tout est si sombre, je ne voudrais pas me trouver seul en studio avec elle !

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Y. : On aurait pu en faire sans problème un morceau de 30 mn au moins. Peut-être que je n’aurais même pas supporté de l’écouter moi-même mais ce serait dingue non ? Une chanson autodestructrice.

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  1. Stuck Together Pieces

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G. : Un des rares textes narratifs de Thom : ça raconte une histoire au lieu de suggérer un sentiment.

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Y. : Le texte s’est écrit tout seul. Je n’y ai pas beaucoup pensé, c’est sorti comme ça. Un texte rapide et assez joyeux, même si « joyeux » est une voie que je n’emprunte jamais. D’après la devise : « Quoi ? Joyeux ? Oubliez ça ! » Mais cette fois c’était comme ça et j’en suis assez fier.

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  1. Judge, Jury and Executioner

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Y. : Et voilà exactement le contraire. C’est pas que j’aimais pas le texte mais « joyeux » ne convient pas bien à celle-là.

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G. : J’aime bien ce groove noué. Mauro a vite capté le truc pour jouer ce rythme. C’est incroyablement délicat, c’est juste adapté pour un cerveau d’ordinateur alien comme le sien !

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  1. Reverse Running

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Y. : L’une des rares pistes d’AMOK qui s’est faite très simplement. Pas de longs préambules, pas de lutte autour de la finition. D’une minute à l’autre le morceau était là et fini. Rien à ajouter.

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G. : J’aime bien la manière dont cette piste se détache à la fin toute seule. Quand on organise l’ordre des morceaux, on finit toujours par se trouver devant un choix : on sort une chanson pop ou on en met une. Dans ce morceau, il y avait trop de potentiel pour la traiter vite fait.

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  1. Amok

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G. : Le dernier morceau, parce que ça sonne comme ça, on est à la fin, à tous les points de vue. On atteint la ligne d’horizon.

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Y. : Sans doute mon morceau préféré. Il a tellement de profondeur. Quand on revoit les morceaux d’un album, il y a toujours une chanson qui donne à penser : OK, on y est, c’est ça. Le point d’arrivée, c’est celle-là.

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