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Jonny Greenwood: ses ondes Martenot, ses poules, et Present Tense

Le journal Uncut avait proposé à ses lecteurs d’envoyer des questions dans lesquelles puiserait Jonny Greenwood pour leur numéro à paraître le 23 octobre (oui, je sais, on est le 22 et on n’arrête pas le progrès !).

Voici la traduction de l’article avec des questions posées par des fans (dont un Français qui se distigue par la question la plus geek !) et par quelques célébrités choisies sur le volet (c’est la règle de l’exercice), plutôt des copains de Jonny (mais Matt ?) :

Une entrevue avec Jonny Greenwood

Le guitariste de RH et compositeur de musiques de films a choisi les questions portant sur les jeux vidéo, les instruments bizarres et son élevage de poules : « j’ai eu beaucoup d’ensevelissements à faire… Â»
 
 Nous avons reçu un plein sac de questions pour JG. Des centaines en réalité, posant au guitariste de RH et compositeur de musiques de films des questions sur tout, de la santé de ses poules jusqu’à des recherches précises sur les pédales d’effets qu’il utilisait sur les premières B-sides de RH. Surtout ici pour parler de sa dernière composition, pour le nouveau film de PT Anderson, The Master, JG a été content d’évoquer ses années d’adolescent joueur d’alto dans l’orchestre des jeunes de Thames Vale, il nous a dit quels étaient ses jeux vidéo favoris et nous a mis au courant de l’état de certains titres non enregistrés de RH : « On a une longue histoire de chansons écrites et traînant par là sans être enregistrées pendant des années Â» explique-t-il.
 
Bon, et maintenant, voici vos questions :
Question de Matt Bellamy, Muse : comment en êtes-vous venu à écrire des musiques de films, et comment est-ce que ça diffère de l’écriture de chansons pop ? Comme vous pouvez le deviner, je suis jaloux de votre nouveau statut…
 
JG : c’est seulement une autre manière de collaborer avec les gens. – comme d’être dans un groupe mais avec un réalisateur, et un tas d’images et d’histoires – au lieu d’être avec des batteurs et des bassistes. C’est super ! Ne soyez pas jaloux. En plus, vous et moi on ne verra jamais que les côtés les plus sympas du métier. Les compositeurs qui le font correctement à plein temps ne sont pas traités si bien – sur beaucoup de films, ils restent tout en bas juste en-dessous du maquilleur, par ordre d’importance, et on ne leur donne pas beaucoup de liberté pour essayer quelque chose. On m’a juste proposé de faire un film parce qu’ils n’avaient plus leur compositeur habituel, je pense que ça arrive souvent. J’ai mieux compris pendant l’écriture de The Master. Je n’arrêtais pas d’ajouter des morceaux de flûte jazzy et Paul m’envoyait sans arrêt des photos de Ron Burgundy (NDT : par autodérision, pour qu’il ne se prenne pas trop au sérieux).
 
Shane Rubano, Ithaca, NY : comment avez-vous commencer à collaborer avec PTA ? Qu’est-ce qui vous a plu dans ses films ?

JG : il est tombé sur des bootlegs de musique orchestrale que j’avais écrite, et il les a mis sur quelques premières scènes de TWBB et ensuite il m’a demandé d’en faire d’autres. Il est très enthousiaste à propos de la musique. Il est venu le jour où on a enregistré les cordes dans les sturios d’Abbey Road et on était tous les deux excités d’être tout près d’un orchestre.
 
Nicolas Guana, Buenos Aires : quelle est la première guitare que vous ayez achetée ? et quelle est la première chanson que vous ayez jouée ?
 
JG : j’ai acheté 40£ une Fender acoustique dans la rubrique « occasion Â» de l’Oxford Journal quand j’avais 14 ans, et puis une électrique que j’ai achetée à mon professeur à 16 ans. L’acoustique je l’ai encore, mais l’électrique m’a été volée à Leeds sur la première tournée de RH (au la salle Duchess of York je crois, c’était une Telecaster crème si quelqu’un l’a vue) ? Je ne me souviens pas avoir joué beaucoup de chansons d’autres groupes, peut-être « Psycho Killer Â» des TH. Il y avait une petite salle de guitare à l’école quand on était ado et on se jouait mutuellement des chansons de U2 mais je n’ai jamais eu de disques de U2.
 
Laura Taylor, Penge : pourquoi est-ce que la musique de We Need To Talk About Kevin n’a jamais été publiée ? Est-ce que ça viendra ?
 
JG : ce n’était pas assez long. Il y avait des trucs à la harpe celtique pas mal mais le reste était surtout fait sur ordinateur et enregistré à partir d’une vieille radio ondes longues…C’était bien pour le film mais c’est pas vraiment la musique des Aventuriers de l’Arche perdu….
 
Srtephen Malkmus : est-ce que tu écris des chansons « rock Â» de la même façon que des morceaux classiques comme pour TWBB ?
 
JG : je suis pénalisé par ma complète inaptitude à chanter, du coup à part quelques séquences d’accords de guitare je ne peux pas vraiment écrire des chansons. Et pour ce qui est du classique, en ce moment j’aime bien écrire sur papier, c’est un peu comme faire un film-photo, à cause du long délai entre les moments où on a des idées, on les voit comme si elles venaient tout de suite. Des semaines de travail et tout est mis en place en une après-midi de réalisation, et c’est la première fois où tu vois ce que ça donne.
 
Matthew Widham, Missoula : comment vont vos les poules ?
 
JG : elles vont bien, merci. Très bonnes pondeuses. Les Å“ufs sont très bons. Je vous en mets une douzaine ? On a des renards de temps en temps et ça tourne à la scène de carnage quand ça arrive, pas mal d’enterrements à faire. Les renards en prennent un ou deux et zigouillent les autres.
 
Nicolas Ombrek, via email : les 4 nouvelles chansons qui ont été jouées pendant la tournée actuelle de RH sont excellentes. Mais dites-nous, quels plans pour celles que les fans adorent et qui ne sont pas encore enregistrées « The Present Tense Â», « Burn the Witch Â», « Open the Floodgates Â» et « Big Boots Â», s’il vous plaît ?
 
JG : nous avons une longue histoire avec des chansons écrites, traînant par là et pas enregistrées pendant des années. « Nude Â» c’était une vieille chanson, comme « the Daily Mail Â». Parfois ça marche bien pendant les répétitions pour un enregistrement, alors on le fait. D’autres fois ça marche pas du tout. J’espère qu’on reviendra à certaines d’entre elles, surtout « Burn the Witch Â» et « Present Tense Â» qui pourraient être très bien, si on arrive à trouver les arrangements adéquats.
 
Kaspar Oja, Estonie : quels sont vos jeux vidéo favoris en ce moment ?
 
JG : ah, on est entre vieilles connaissances ici, n’est-ce pas ? Et bien, on est en tournée, alors je suis limité aux jeux de mon Mac. C’est pas le mieux pour les jeux, je suis sûr que vous le savez. Ou que vous le sauriez, si vous êtes un fondu de jeux. J’ai fini Portal 2 sur la première partie de la tournée américaine, c’était parfait parce que tous ces stades ressemblaient exactement à ces chambres dans Portal : des couloirs sombres, d’immenses boîtes en béton sans ouverture : c’était troublant d’aller de Portal à la réalité. C’est un bon jeu d’ailleurs. J’ai arrêté avec les jeux de combat, mais ça me manquait le côté exploration de ces jeux, donc les deux Portal c’était juste bien pour moi. Quoi d’autre ? Limbo c’est un bon jeu. Ski Safari est très bien écrit. Comme Plant vs Zombies. Et je viens de commencer Braid pour la seconde fois…j’aime bien l’idée ue saut dans le temps, ça me fait vraiment gamberger.
 
Amy Brown, via email : en dehors des ondes Martenot, quels instruments inhabituels aimez-vous ?

JG : Je suis conscient que pour certains groupes, collectionner le matériel musical est une manière d’éviter de composer de la musique actuelle- toutes ces discussions infinies à propos de vieux claviers bizarres. Cela concerne le son des choses plutôt que ce qu’on fait avec : donc j’ai arrêté d’essayer de jouer sur de nouveaux instruments, et au lieu de ça j’apprends à jouer correctement des ondes Martenot. Cela mérite beaucoup plus de temps que j’en ai accordé.
 
Allen Gallagher, Paisley : qu’est-ce que vous pensez de la façon dont on vous a refusé la nomination aux Oscars pour TWBB juste parce que le film contenait d’autres compositions plus anciennes ?
 
JG : le gros coup c’était d’avoir eu le boulot, et puis il y a eu ce jour très heureux d’enregistrement des cordes à Londres. Rien ne pouvait aller au-delà de ça. De toutes façons, j’ai eu un Prix Kermode, dont je suis très fier, même si ça ressemble à un truc pour enfant fait en pâte à modeler avec du spray doré dessus.
 
Paul Miano, Portsmouth : vous avez dit récemment dans une interview que vous pensiez que la guitare était « démodée Â». Que vouliez-vous dire ? D’un point de vue technique, les orchestres et les ondes Martenot ne sont-ils pas bien plus démodés ?
 
JG : Je sais, je sais, c’est la contradiction qui tourne en boucle dans ma tête. Fondamentalement, soit vous rejetez tout ça comme obsolète…ou alors vous les traitez sur le même plan. Je préfère la dernière solution. Je pense que je voulais seulement souligner comme c’est devenu banal de former un groupe à guitares, c’est pas tout à fait comme les groupes de jazz dixieland mais ça y ressemble. Regardez les couvertures du Melody Maker dans les années 20, 60 et celles du NME aujourd’hui : des banjos, des groupes à guitare, des groupes à guitare. Peut-être qu’il n’y a pas d’autres moyens de faire de la bonne musique live dans un petit groupe, et l’essence de ça – jouer de la guitare dans une pièce avec un batteur- est tout à fait satisfaisant. Mais alors je suis content d’admettre que ces p…d’ondes Martenot ne sont pas bien loin. Alors…je travaille encore là-dessus…Caribou sont plutôt incroyables et sont vraiment un groupe, donc de nouvelles bonnes choses peuvent arriver avec des gens tapant sur des trucs.
 
Adam Buxton : est-ce que l’humour fait partie de la musique ?
 
JG : c’est amusant de répondre à cette question après celle de Malkmus. Ses paroles le prouvent, et ce sont les rares que je connaisse par cÅ“ur : « â€¦tell me off in the hotel lobby, right in front of all the bell-boys, and the over-friendly concierge Â». Comment il chante ça, comment c’est écrit, la mélodie…c’est parfait.
 
Nick Claiden, Whitby, NY : que vous restent-ils comme souvenirs de vos années d’ado où vous jouiez de l’alto dans l’orchestre des jeunes de Thames Vale et quand est-ce que vous y avez joué pour la dernière fois ?
 
JG : c’était la première fois où j’entendais un orchestre complet jouer, c’était vraiment un moment spécial pour moi. On répétait à l’école Larkmead à Abingdon. Je me souviens avoir été impressionné d’entendre toutes ces cordes dans la même pièce, tous jouant accordés (à l’inverse des orchestres scolaires).Remarquez, ça a vite été fini avec moi dans les altos. J’avais juste réussi à entrer là parce que je jouais de l’alto, qui n’est pas un instrument très apprécié. Le chef nous faisait jouer plein de Sibelius, et j’écoute encore cette musique, le Concerto pour violon est un bon moyen d’entrer dans la musique classique quand on est un enfant. J’ai arrêté de jouer dans l’orchestre quand on a signé chez EMI et commencé à tourner.
 
Antoine Charie, Lyon : combien avez-vous de pédales d’effets et quelle est votre préférée ? 
 
JG : 7 ou 8 ? J’aime celles qui font un truc simple, comme le changement de hauteur ou le blocage audio (freeze audio). Je ne suis pas très intéressé par tous les trucs délicats à manier…les différents types de pédales de distorsion et tout ça. Pendant les sessions de HTTT, je suis passé par une période où j’utilisais seulement des sons de guitare propres, sans effet, c’était un peu infructueux et austère mais je voulais m’empêcher de me reposer trop sur les pédales, et vori si on pouvait sortir des trucs bien sans ça.
 
Jared Nagle, San Francisco : qu’est-ce qui vous a plus influencé chez Penderecki que chez, par exemple, Stockhausen ou Cage ?
 
JG : et bien…ce qui est intéressant chez Penderecki, c’est qu’il a connu la musique électronique dans les années 60 et qu’il a transféré cette connaissance dans l’orchestration, l’utilisant pour produire des sons et des textures plus étranges que n’importe qui pouvait faire avec des synthétiseurs. Un orchestre qui joue ses morceaux abstraits est plus bizarre que de s’asseoir devant la plupart des choses que vous pouvez entendre sortant d’amplis. Essayer d’aller à un concert si vous pouvez. La Première Symphonie est une bonne entrée en matière.
 

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